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Brève

 

Le 26 juin 2018

 

 

"Comprendre sans prévoir, prévoir sans comprendre"

De Hubert Krivine (LPNHE)

 

L’idée que comprendre permet de prévoir est une idée moderne. Elle est fondée sur la découverte, que le monde physique obéit à des lois (Galilée, et surtout Newton). Elle a mis fin à la pensée magique, et elle est à la base de la révolution scientifique et du monde moderne. Or nous assistons à la dissociation de ces deux choses. D’une part, on réalise par exemple que les lois mathématiques de certains phénomènes, mêmes parfaitement connues, sont si sensibles à la moindre imprécision dans les données que cela rend la prévision impossible en pratique. C’est le fameux "effet papillon": un battement d’ailes à Rio pourrait être la cause d’une tornade au Texas. D’un autre côté, la puissance des big data rendrait inutile, selon certains essayistes et quelques scientifiques, le raisonnement théorique. On n’aurait plus besoin de comprendre les causalités puisque la corrélation suffirait.

 

 

Un retour au Moyen Âge en somme, aux recettes qui ont marché, mais avec des données des millions de fois plus nombreuses. En termes économiques, on a découvert avec la révolution scientifique qu’une explication théorique coûtait moins cher que certaines observations : Newton avait prévu l’aplatissement de la Terre sans qu’on ait besoin d’aller voir aux pôles ; aujourd’hui grâce à la rapidité des ordinateurs et des réseaux, les termes de la comparaison s’inversent. À ceci, Hubert Krivine répond notamment que les big data et l’intelligence artificielle qui se fonde sur elles sont conservatrices, et que si elles conviennent aux assureurs, elles ne peuvent pas prévoir des choses nouvelles et extraordinaires. Les ordinateurs composent aujourd’hui sur demande du Mozart ou des ballades celtiques, aucun n’invente de musique nouvelle. Ils conduisent des voitures, mais aucun n’explique le mystère de la "matière noire". La machine peut aider l’homme, elle ne le remplacera pas.

 

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