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Foire aux questions - Les réponses

 

Les atomes et noyaux atomiques

 

Le modèle relativement simple de la "goutte liquide" utilisé pour décrire le comportement du noyau atomique et calculer, entre autres, son énergie de liaison est-il encore d'actualité ? Si oui, dans quel(s) domaine(s) est-il utilisé et existe-t-il des expériences en cours qui l’utilise (description des mécanismes de fusion, de déformation du noyau…) ?


Le concept de goutte liquide est toujours utilisé, car il est simple et il décrit l'essentiel du comportement du noyau atomique. Il permet de se faire une image du noyau, même si elle est trop simpliste pour être correcte. Pour rendre compte des déviations importantes existant entre ses prédictions et les mesures expérimentales, il est indispensable d'arriver à le faire cohabiter avec le modèle en couche. Cela n’est pas facile, mais donne d'assez bons résultats.
C'est également un ingrédient qui peut entrer dans les modèles de fusion. Enfin, les déformations du noyau sont aussi exprimées en termes de déformation de goutte liquide : au lieu d'être sphériques, les noyaux s'aplatissent vers une forme de disque (deux axes égaux, et le troisième plus court) ou s'allongent vers une forme de ballon de rugby (le troisième axe plus long que les deux autres), ou même vers une forme plus bizarre si les trois axes ont des longueurs différentes. La déformation est mesurée par le rapport entre les longueurs des axes des ellipsoïdes.
En revanche, on ne peut pas vraiment dire que des expériences soient basées sur ce modèle.
thibault@csnsm.in2p3.fr, 03 juin 2002

 

Que représente le "mass excess" donné dans tous les tableaux de masses nucléaires ? Les masses fournies tiennent-elles toujours compte de l'énergie de liaison électronique, ou y a-t-il des données différentes pour les masses atomiques et les masses nucléaires ?


Le "mass excess" est égal à M – A×u, où M est la masse atomique exprimée en unité de masse atomique, A le nombre atomique c’est-à-dire le nombre total de nucléons (A = N + Z) et u l’unité de masse atomique (u = 1/12 de la masse atomique du carbone 12). Par définition, le mass excess du carbone 12 est donc exactement égal à zéro. On utilise le mass excess plutôt que la masse atomique par commodité pour avoir un nombre plus petit. Quant au choix de tabuler des masses atomiques, il vient du fait que lorsqu'on mesure une énergie de décroissance (bêta, alpha…), on mesure une masse atomique et non une masse nucléaire.
Par spectrométrie de masse, on mesure généralement la masse d'un ion une fois ionisé et il est alors facile de corriger pour l'électron manquant ou en trop. Certaines mesures sont très précises, bien au-dessous de 1 eV. Voir l'évaluation des masses sur le site AMDC (Atomic Masses Data Center).
Il commence également à y avoir quelques mesures sur des noyaux ayant perdu tous leurs électrons. De tels noyaux sont produits dans des réactions nucléaires et leur masse est directement mesurée avant qu'ils ne récupèrent des électrons en interagissant avec de la matière. De telles expériences sont réalisées au GSI à Darmstadt en Allemagne, ou quelquefois au Ganil à Caen, deux laboratoires possédant chacun un accélérateur d'ions lourds. Le projectile peut être cassé et continuer avec une vitesse importante permettant de faire des mesures de temps de vol qui donneront une mesure de la masse si on mesure aussi l'impulsion. Mais ces mesures ont des précisions de 100 keV au mieux.
Les théoriciens calculent des masses nucléaires. Il leur faut ajouter les masses des électrons et retirer leur énergie de liaison (13 eV pour l'hydrogène, mais de l'ordre de 700 keV pour l'uranium). En pratique, beaucoup d'entre eux ne s'occupent pas de l'énergie de liaison des électrons qui est plus ou moins prise en compte dans l'ajustement des paramètres de leur formule. Leurs précisions ne sont jamais meilleures que 200 ou 300 keV. Par exemple, dans la formule de J. Duflo et A. Zuker, l'énergie de liaison des électrons n'apparaît pas explicitement (Un programme fortran existe qui permet de calculer les masses atomiques au moyen d'une formule élaborée par J. Duflo et A. Zuker. Le programme fortran est le fichier du_zu_10.feb96fort. Les résultats sont dans le fichier du_zu_10.feb96).
thibault@csnsm.in2p3.fr, 27-29 mai 2002

 

Nouvelle compréhension des transitions de phase au niveau microscopique


Les transitions de phase et les changements d'état sont un phénomène universel que chacun rencontre au quotidien. La neige fond au Soleil, l'eau bout dans les théières… Quand on chauffe un liquide, on observe que sa température augmente jusqu'à ce qu’il entre en ébullition. L'accroissement de température s'arrête alors miraculeusement car toute la chaleur est utilisée pour transformer le liquide en vapeur. Cette propriété, bien étrange si on y réfléchit, est bien utile pour la cuisson au bain-marie ! Vous êtes-vous jamais interrogé sur l'origine de ce comportement étrange ? Des développements théoriques récents suggèrent qu'au niveau élémentaire des très petits systèmes, cette anomalie apparaîtrait de façon encore plus étonnante : pendant le changement d'état - par exemple de liquide à gaz - le système refroidirait alors qu'on le chauffe, c’est-à-dire que sa température diminuerait quand on lui apporte de l'énergie. Imaginez des glaçons microscopiques que vous sortez d'un frigo Lilliputien réglé à -10 degré Celsius ! Alors que vous étudiez ces drôles de glaçons, le soleil sort de derrière une molécule de nylon qui vous servait de parasol et ses rayons se mettent à réchauffer les glaçons qui ne contiennent que quelques dizaines de molécules. Leur température augmente - 5, - 2, 0, mais, contrairement à votre intuition de Gulliver, elle ne s'arrête pas là pour attendre le passage de solide à liquide ! 1, 2 puis 3 degrés défilent dans la colonne de mercure du thermomètre et pourtant les glaçons restent de glace ! Et là, oh surprise ! Après être montés à 5 degrés sans perdre leur intégrité, les glaçons commencent à fondre tandis que la température de votre thermomètre entame une chute vertigineuse. Quelques minutes plus tard, vos glaçons ont fondu, mais l'eau qu'ils ont produite est maintenant à - 5 degrés ! Cela semble fou ! Et pourtant ! Ce phénomène semble avoir été observé pour la fonte des agrégats de sodium et la fragmentation des noyaux atomiques.
chomaz@ganil.fr, 3 mars 2002

 

Pourquoi les atomes (par exemple de fer) vibrent-ils de plus en plus au cœur de leur structure, jusqu'à un changement d'état, lors d’un apport de chaleur ?


Dans un solide, les atomes qui le composent sont liés les uns aux autres, ce qui les maintient à leurs places respectives. Ils ne bougent pas facilement, c’est pourquoi, justement, on parle de "solide". Pour les déplacer les uns par rapport aux autres, il faut arriver à vaincre les forces qui les lient en fournissant de l’énergie au matériau sous forme de travail ou de chaleur.
Quand on chauffe un matériau, on lui fournit de l’énergie thermique qu’il emmagasine (plus son énergie interne augmente, plus il est chaud). Cette énergie est emmagasinée en interne sous la forme d’une énergie de vibration de chaque atome autour de sa position moyenne : dès qu’un atome s’éloigne trop de cette position, la présence des atomes voisins fait en effet qu’il y est repoussé.

Faible température = petite amplitude de vibration.
Haute température = énergie de vibration plus importante et donc amplitude de vibration plus grande.

Cependant, à force de chauffer, il peut arriver que l’énergie emmagasinée soit suffisante pour que l’énergie de vibration de chaque atome (ou molécule) devienne égale ou supérieure au travail nécessaire pour le déplacer. Dans ce cas, les atomes (ou molécules) du solide ne restent plus à leur place : le solide fond et devient liquide (cela se produit à 1538°C pour le fer) ; c’est ce que l’on appelle un changement d’état. Dans la matière liquide, les atomes bougent les uns par rapport aux autres, tout en restant au contact les uns des autres.
Si l’on continue à chauffer le matériau liquide, c’est-à-dire à fournir de l’énergie aux atomes, ce qui les met localement de plus en plus en mouvement, l’énergie mécanique (vibrations et mouvements) des atomes peut alors être suffisante pour vaincre à la fois la pression atmosphérique qui les pressait les uns contre les autres et la tension de surface du matériau. Ils peuvent alors s’échapper du matériau, c’est-à-dire s’évaporer. C’est un autre changement d’état au cours duquel le liquide devient un gaz (cela se produit à 2861 °C pour le fer).
kirsch@ipnl.in2p3.fr, 13 mars 2003

 

Qu’est-ce qu’une section efficace ?


Sous ce terme de "section efficace" se cache la probabilité d'interaction entre deux noyaux. La section efficace est exprimée comme une surface. C'est en quelque sorte l'image de la surface sur laquelle le projectile doit taper pour que la réaction se produise. Elle est donc plus petite que la section physique du noyau cible. L'unité utilisée est le barn = 10-24 cm2 qui correspond à la surface d'un gros noyau. Une section efficace de 1 barn est donc très grande.
La section efficace permet de calculer le nombre d'interactions entre un faisceau incident et une cible : si Ni est le nombre de particules incidentes par seconde, Nc le nombre de particules par cm2 de la cible et sigma la section efficace de réaction en cm2 alors le nombre d'interactions par seconde est Ni×Nc×sigma.
Exemple : si on envoie un faisceau de 1013 protons/s (Ni = 1013 s-1) sur une cible d'hydrogène de 3x1020 protons/cm2 (Nc = 3x1020 cm-2), la section efficace de réaction proton-proton étant de 40 mbarns (sigma = 40×10-3x10-24 cm2), le nombre d'interactions vaut 1,2 x 108 interactions/s.
On peut étudier des réactions nucléaires ayant jusqu'à des picobarns de section efficace.
thibault@csnsm.in2p3.fr, 19février 2003

 

Qu’est-ce qu’une énergie de liaison ?


L'énergie de liaison d'un noyau est égale à la différence entre la somme des masses de ses constituants et la masse du noyau dans son état lié.
Exemple : l'énergie de liaison E du noyau d'hélium 4 (4He), formé de 2 protons et 2 neutrons, vaut : E = 2 Mproton + 2 Mneutron - M4He.
L'énergie de liaison des noyaux est de l'ordre de 8 MeV /nucléon. S’il n'y avait pas d'énergie de liaison (produite par l'interaction forte entre les nucléons), il n'y aurait aucune raison pour que les protons et les neutrons s'assemblent pour former des noyaux.
thibault@csnsm.in2p3.fr, 19 février 2003

 

Comment peut-on concevoir la notion de moment nucléaire alors que le noyau peut être considéré comme un point ?


Considérer le noyau comme un point est une approximation qui peut parfois suffire car le noyau est petit, mais cela ne signifie pas pour autant que le noyau soit un point. Si l’on veut utiliser une image plus précise du noyau, on peut l’assimiler à une goutte liquide de forme sphérique. Comme sa densité est à peu près constante, le volume de la sphère est proportionnel au nombre de nucléons A, et son rayon R est donc proportionnel à la racine cubique de A, soit A1/3 : R = r A1/3, avec r = 1,2 fm (le fermi ou femtomètre fm = 10-15 m)
Si l’on souhaite encore davantage de précisions, il faut savoir que s’il y a des noyaux sphériques, la plupart est déformée. Le cas des noyaux en forme de ballon de rugby (paramètre de déformation bêta > 0) est le plus fréquemment rencontré, mais on trouve aussi certains noyaux qui s'aplatissent pour devenir comme des disques (bêta < 0). Dans ces deux cas, il s'agit d'ellipsoïdes de révolution. Quelques noyaux, cependant, ont plutôt des formes de poire ...
thibault@csnsm.in2p3.fr, 28 mars 2003

 

Qu’est-ce que la structure hyperfine des raies d’absorption / émission d’atomes soumis à un rayonnement ?


La structure hyperfine des raies est due au caractère non ponctuel du noyau (voir question précédente). L’étude de cette structure permet d’ailleurs de prédire la forme du noyau : voir les transparents en anglais au format pdf.
Dans un premier calcul (page 1 des transparents), on considère le noyau comme un point de masse infinie avec les électrons gravitant autour. Les termes d'énergie cinétique et coulombienne permettent de calculer les énergies des niveaux atomiques successifs.
Cependant, les électrons ont un moment orbital l et un spin s. Comme ils possèdent une charge électrique, leur mouvement crée un champ magnétique et les électrons interagissent entre eux. Si l’on prend en compte ces interactions et les effets relativistes (page 2), on trouve alors que les niveaux atomiques sont composés de plusieurs niveaux, séparés par des énergies 10 000 fois inférieures à celles séparant les niveaux atomiques : c'est la structure fine. Si maintenant on prend en compte l'interaction entre le moment magnétique du noyau et le champ magnétique créé par les électrons (page 3), on trouve que les niveaux "fins" sont eux-mêmes composés de plusieurs niveaux, séparés par des énergies encore 10 000 fois plus petites. Ce sont les niveaux hyperfins dont les positions dépendent du moment magnétique du noyau.
Si la distribution des protons dans le noyau n'est pas sphérique, le moment quadripolaire électrique du noyau (Qs) intervient. Il déplace alors les niveaux hyperfins (page 4). La mesure des énergies de transition entre les niveaux hyperfins va permettre de déterminer certaines caractéristiques du noyau : le moment magnétique et le moment quadripolaire électrique Qs qui est lié au paramètre de déformation bêta (page 5).
On observe également un déplacement des raies quand on passe d'un isotope à un autre (page 6). Cet effet est dû d’une part à la variation de masse du noyau et d’autre part à la variation du nombre de neutrons qui va modifier la forme du noyau et la distribution des protons. Or, quand le noyau se déforme, puisque son volume reste constant, au moins un des axes de l'ellipsoïde est supérieur au rayon Rs de la sphère de même volume. Et comme le noyau tourne sur lui-même, le rayon moyen va paraître plus grand que Rs. On a donc un déplacement isotopique (isotope shift) qui reflète ces variations. Dans le cas de noyaux légers, comme les isotopes de sodium, l'effet principal est dû à la variation de masse. Mais dans le cas de noyaux lourds, comme les isotopes de rubidium, l'effet principal est dû à la variation du rayon de charge (en réalité c'est la moyenne du carré du rayon, appelé rayon carré moyen, qui intervient).
Dans le cas du rubidium (page 7), le nombre de neutrons est en abscisse et la variation du rayon carré moyen de charge en ordonnée. On observe en vert la variation donnée par la formule de la goutte liquide (noyau sphérique). Les points expérimentaux, en rouge, montrent que seul l'isotope de rubidium ayant 50 neutrons est sphérique. Tous les autres points sont au-dessus de la ligne verte, ce qui correspond à des rayons plus grands et donc à des noyaux déformés. On voit même que le rayon moyen augmente quand on diminue le nombre de neutrons de 47 à 41.
thibault@csnsm.in2p3.fr, 28 mars 2003

 

Quelle est la différence entre les deux groupes d'expressions suivants : excès et défaut de masse nucléaire d'une part et excès et défaut de masse atomique d'autre part ?


La différence nucléaire / atomique intervient plutôt pour la masse et non pas pour un "excès de masse" ou un "défaut de masse" :
masse nucléaire = masse du noyau composé de Z protons et N neutrons
masse atomique = masse de l'atome = masse du noyau + Z × m(électron) - B(électrons), B(électrons) étant l'énergie de liaison totale de tous les électrons de l'atome.
L'"excès de masse" ("Mass Excess" ou ME) est un terme qui a une définition très précise quand il est utilisé dans les tables de masses atomiques et par ceux qui les mesurent : ME = Mx - A×u, M étant la masse atomique (masse du noyau avec tous ses électrons), A le nombre de nucléons du noyau (nombre de neutrons + nombre de protons) et u l’unité de masse atomique égale à 1/12 de la masse de l'atome de carbone 12 (en d'autres unités, u vaut 931494.3 keV ou 1660540x10-33 kg). Par conséquent, pour le carbone 12, par définition, ME = 0. L'excès de masse n'a pas d'interprétation physique directe, mais il est très pratique pour exprimer les masses avec moins de chiffres. Par exemple, pour l'uranium 238 : M = 238,050783×u alors que ME = 50783×10-6u = 47304 keV. Par définition, l'excès de masse peut être positif ou négatif et l’on ne parle donc pas de défaut de masse dans ce contexte.
On parle quelquefois de "défaut de masse" lorsque l’on évoque l'énergie de liaison d'un noyau. Cette énergie B(noyau) est la différence entre la somme des masses de ses constituants et sa masse : B(noyau) = Z×m(proton) + N×m(neutron) - m(noyau). Si elle est positive, le noyau est lié et l’on peut dire alors qu'il a un "défaut de masse" par rapport à la somme de ses constituants.
thibault@csnsm.in2p3.fr, 7 mai 2003

 

Lors de la fission de l'uranium (235 ou 237), quelle est la quantité d'énergie dégagée par noyau fissile ? Est-elle bien de l'ordre de 200 MeV ? Cette énergie dégagée provient d'un défaut de masse qui se transforme en énergie. Mais, lors de la fission d'un atome, quelles sont les particules qui se transforment en énergie ?


Réponse 1
La quantité d’énergie dégagée par noyau fissile est bien de l’ordre de 200 MeV. On peut calculer cette énergie en comparant la masse de l'uranium à la somme des masses des produits de fission. Par exemple, pour la fission :
uranium 235 → rubidium 92 + césium 138 + 5 neutrons
m(235U) - m(92Rb) - m(138Cs) - 5×m(neutron) = 158 MeV.
Aucune particule ne se transforme en énergie lors de la fission d’un atome. Dans l'exemple ci-dessus, il y avait 92 protons et 143 neutrons au départ. Il y en a autant après la fission. L'énergie dégagée est de l'énergie libérée qui provient du gain en énergie de liaison (ou en défaut de masse, ce qui est analogue), l'énergie de liaison (B) étant la différence entre la somme des masses des neutrons et protons et la masse du noyau :

  • uranium 235 : B = 1784 MeV
  • rubidium 92 : B = 788 MeV
  • césium 138 : B = 1154 MeV
  • neutrons : B = 0

La différence d'énergie de liaison est (788 + 1154) - 1784 = 158 MeV.
Pour transformer de la matière en énergie, il faut faire intervenir l'antimatière : quand une particule s’annihile avec son antiparticule, il ne reste que du rayonnement, c'est-à-dire de l'énergie. Quand on transforme de l'énergie en matière, on crée exactement autant de matière que d'antimatière.
thibault@csnsm.in2p3.fr, 7 mai 2003


Réponse 2
En ce qui concerne l’énergie libéré par la fission, voici un livre qui devrait contenir des informations sur le sujet : "Moi, U235 noyau radioactif", roman scientifique d'Étienne Klein. En fait, l’énergie dégagée est de l'ordre de 1 MeV par constituant (protons et neutrons), ce qui donne bien, globalement, 200 MeV par noyau fissile de U235.
En ce qui concerne le défaut de masse, il faut comprendre 3 choses.
a) Énergie de liaison
Quand deux objets sont liés (collés), il faut dépenser beaucoup d'énergie pour les décoller l'un de l'autre. Comme l'énergie se conserve, quand on avait collé ces deux objets, on avait gagné la même énergie (sous forme de chaleur). Cette énergie est l'énergie de liaison (celle qui lie les deux objets). Par convention, on la compte négativement pour se rappeler qu'il faut ajouter cette énergie pour briser la liaison et arriver à deux objets séparés (énergie de liaison nulle). Ce raisonnement est valable quelle que soit la liaison. Par exemple, pour la liaison chimique : il faut de l'énergie pour dissocier l'eau en hydrogène et oxygène, mais quand on recrée le lien (combustion de l'hydrogène éventuellement explosive, pile à combustible), on gagne la même quantité d’énergie. Pour la liaison nucléaire, quand on assemble un proton et un neutron pour faire un deutéron, on gagne beaucoup d'énergie (c'est la fusion).
b) Énergie d'une réaction
Évoqué pour deux objets, le raisonnement précédent peut être généralisé aux liaisons entre plusieurs objets. Si, au cours d’une réaction, on passe d'un certain agencement de tous ces objets vers un autre agencement (comme la fission d’un noyau en deux noyaux), l'énergie que l'on récupère est la différence entre les énergies de liaison de ces deux agencements : E = E(liaison initiale) - E(liaison finale). Si le nouveau système est davantage lié que le système de départ, on gagne de l'énergie.
c) Énergie et masse
Le dernier point concerne le lien entre l’énergie et la masse. Depuis Einstein, nous avons compris que l'énergie et la masse sont reliées et même proportionnelles : E = Mc2, c étant la vitesse de la lumière. Donc si un système change de liaison, il change de masse. Si l’on pèse une pile neuve, elle est plus lourde (sa masse est plus élevée) que la même pile usagée, la différence de masse étant l'énergie (divisée par c au carré, bien sûr) qu’elle a fournie. Autre exemple, la différence de masse entre deux objets séparés et deux objets liés est l'énergie de liaison. Bien sûr, en général, ces différences de masse sont si petites qu'il est très difficile de les mesurer. En revanche, les réactions nucléaires mettent en jeu de telles énergies que la variation de masse devient appréciable.
Donc, lors de la fission, aucune particule ne se transforme en énergie. C’est le nouvel agencement qui, s’il est davantage lié, a perdu de la masse (variation de l’énergie de liaison divisée par c au carré) qui a été transformée en énergie.
chomaz@ganil.fr, 02 mai 2003

 

Est-il possible d’avoir des éclaircissements sur la notion de spin ? S’agit-il d’une rotation et si c’est le cas, comment se manifeste-t-elle ? Comment les expériences de résonance magnétique nucléaire permettent-elles de déterminer le spin nucléaire ? Par ailleurs, qu’est-ce que l’isospin ?


Le spin est le moment cinétique intrinsèque des particules élémentaires et des noyaux atomiques. Il ne peut prendre que certaines valeurs et ne varie donc pas de façon continue. Par exemple, le spin de l’électron vaut 1/2 et sa projection sur un axe peut prendre les valeurs +1/2 ou -1/2. On se représente souvent le spin comme lié à la rotation de la particule sur elle-même, laquelle tourne dans un sens ou dans l'autre par rapport à sa vitesse de propagation comme une hélice, ou un tire-bouchon, qui peut être "droit" ou "gauche". Les particules élémentaires ont un spin semi-entier ou entier. Celles qui possèdent un spin semi-entier comme l'électron, le proton ou le neutron (spins 1/2) sont les fermions. Ils obéissent au principe d'exclusion de Pauli : il ne peut pas y avoir deux fermions dans exactement le même état quantique. Les particules ayant un spin entier comme le photon (spin 0) sont les bosons pour lesquels il n'y a aucun principe d'exclusion. En ce qui concerne les noyaux, leurs spins peuvent prendre des valeurs très variées puisqu’il faut combiner les spins des Z protons et des N neutrons qui les composent. Les noyaux qui ont N et Z pairs ont un spin nul. Ceux qui ont N et Z impairs ont un spin entier. Ceux qui ont N et Z de parités différentes ont un spin semi-entier.
Expliquer comment l’on détermine le spin nucléaire par les expériences de résonance magnétique nucléaire est assez complexe et nécessite des schémas.
L'isospin est un opérateur de même type que le spin, mais ce nombre quantique caractérise l'état de charge du système. Pour un nucléon, la valeur de l’isospin est 1/2 et sa troisième composante (projection sur l'axe z) vaut -1/2 pour le proton et +1/2 pour le neutron. Pour un noyau de Z protons et N neutrons, l'isospin vaut (N-Z)/2. Les noyaux qui ont N et Z pairs ou N et Z impairs ont un isospin entier. Les noyaux qui ont N et Z de parités différentes ont un isospin semi-entier.
thibault@csnsm.in2p3.fr, 7 mai 2003

 

Sur quel un site peut-on trouver un grand nombre de valeurs d'énergie de liaison par nucléon ?


Il est possible de consulter les données du "Atomic Mass Data Center" et le fichier des masses recommandées par l'Atomic Mass Evaluation qui donne toutes les énergies de liaison. Il suffit ensuite de diviser par le nombre de nucléons.
thibault@csnsm.in2p3.fr, 4 juillet 2003

 

La décroissance de l’ionisation après le "pic" de Bragg est-elle due au "potentiel d’ionisation" ?


En partie oui car le "potentiel d’ionisation" intervient indirectement.
Pour mettre en mouvement les objets électriquement chargés que sont les électrons et les noyaux des atomes (arrachement d'électrons et déplacement d'atomes), il faut leur apporter de l’énergie. Lors d’une collision entre un ion et une cible mettant en jeu les forces électrostatiques de répulsion ou d'attraction (charges de même signe ou de signe contraire), un transfert d’énergie de l’ion incident vers les électrons des atomes de la cible peut se faire. Si ces forces sont appliquées suffisamment longtemps elles sont susceptibles de "communiquer" aux électrons du milieu traversé une énergie cinétique suffisante pour les arracher du noyau auquel ils étaient liés. En revanche, si l’ion est très rapide et donc le temps d’application très court, l’énergie transférée pendant la collision est faible et le processus d’ionisation moindre.
En ce qui concerne le pic de Bragg, il faut le considérer comme l’évolution de l’ionisation des atomes d’une cible frappée par un ion en fonction de la profondeur de pénétration de cet ion, c'est-à-dire comme l'évolution de l’énergie déposée par unité de longueur dans la matière traversée. Au fur et à mesure du ralentissement de l’ion dans la matière, on obtient :
- une première phase d’augmentation de l'ionisation : en surface, l’ion étant très rapide, le temps d’application des forces électrostatiques est court, peu d’énergie est transférée induisant peu d’ionisation. Tout le long de sa trajectoire, l’ion en mouvement met en branle les électrons de la cible aux dépens de sa propre énergie cinétique qui ne cesse de décroître. Plus l'ion est ralenti, d’autant plus long est le temps durant lequel les électrons du voisinage des atomes cibles subissent les forces électrostatiques et d’autant plus forte est l’ionisation !
- une deuxième phase de décroissance de l'ionisation : celle-ci commence au moment où l’énergie cinétique de l’ion devient insuffisante pour provoquer l'ionisation des atomes cibles, c’est-à-dire que l’énergie transférée devient inférieure à leur "potentiel d'ionisation" qui définit le travail à fournir pour leur arracher un électron.
Résumé simplifié :

  • 1 - au départ, temps trop court pour ioniser efficacement car trop grande vitesse de l’ion
  • 2 - puis, ralentissement et efficacité d'ionisation maximale = pic de Bragg
  • 3 - enfin, l’ion n'a plus l'énergie cinétique suffisante pour ioniser les atomes cibles

(autre réponse traitant du pic de Bragg)

kirsch@ipnl.in2p3.fr, 9 juillet 2003

 

Comment calcule-t-on la variation d'énergie ΔE lors de la désintégration bêta+ d'un noyau d'oxygène 15 en azote 15 ? En effet, en écrivant 15O → 15N + e+ et ΔE = 15×énergie de liaison par nucléon (15N) - 15×énergie de liaison par nucléon (15O) et en utilisant les valeurs trouvées sur jvNuBase, soit 7699 keV pour 15N et 7463 keV pour 15O, on obtient une variation d'énergie positive, ce qui indique que le système gagne de l'énergie !


Il y a en effet désintégration bêta+ seulement si de l'énergie est libérée, l'évolution spontanée d’un système conduisant toujours vers une plus grande stabilité. Or, le système le plus stable est celui dont la masse est la plus faible. Et l'énergie de liaison étant égale à la somme des masses des constituants moins la masse du noyau, le noyau le plus stable est celui dont l'énergie de liaison est la plus grande.
Dans le cas cité, l'énergie de liaison de 15N (15×7699) est en effet plus grande que celle de 15O (15×7463), donc la désintégration se fait dans le sens oxygène → azote. Et bien sûr, la masse de 15N est plus petite que celle de 15O.
Cependant, si l’on veut faire un calcul numérique précis, il faut tenir compte du fait que les masses et les énergies de liaison données dans la Table se rapportent aux atomes et non aux noyaux. Le calcul de ΔE proposé n'est donc pas exact. De plus, lorsqu’un noyau peut se désintégrer en émettant un positron (radioactivité bêta+), ce qui donne pour 15O : 15O → 15N + e+, il a aussi la possibilité d’opérer cette transmutation par capture d’un électron, ce qui donne pour 15O : 15O + e-15N. En conséquence, pour tenir compte de la présence d'un électron dans l'état initial ou d'un positron dans l'état final, il faut faire le calcul avec les masses et non avec les énergies de liaison. En appelant m la masse du noyau, M la masse de l'atome et me la masse d'un électron ou d'un positron, on a (en négligeant l'énergie de liaison des électrons) :
m(15O) = M(15O) - 8me
m(15N) = M(15N) - 7me
Pour 15O → 15N + e+, on a : ΔE = [M(15N) - 7me + me] - [M(15O) - 8me] = M(15N) - M(15O) + 2me
Pour 15O + e- → 15N, on a : ΔE = [M(15N) - 7me] - [M(15O) - 8me + me] = M(15N) - M(15O)
On voit que pour que le noyau puisse capturer un électron, il suffit d'avoir M(15N) - M(15O) inférieur à 0. Par contre pour émettre un positron, il faut que M(15N) - M(15O) soit inférieur à - 2me soit à - 1022 keV. Cependant, quand la désintégration bêta+ est possible, elle est préférée car le noyau n'a pas à trouver un partenaire électron à capturer.
Dans le cas proposé, on a :
M(15N) = 15 000 109 micro unit
M(15O) = 15 003 066 micro unit
M(15N) - M(15O) = - 2 957 micro unit = - 2755 keV < - 1022 keV
15O décroît donc à 100 % par désintégration bêta+ : 15O → 15N + e+
Par contre avec par exemple la paire 37Ar / 37Cl, on a M(37Cl) - M(37Ar) = - 814 keV si bien que 37Ar décroît à 100 % par capture électronique : 37Ar + e-37Cl
Dans le cas de la désintégration bêta-, c'est plus simple. On a toujours émission d'un électron. Par exemple dans le cas 15C → 15N + e-, ΔE = [M(15N) - 7me + me] - [M(15C) - 6me] = M(15N) - M(15C). Ainsi, si la différence de masse atomique est négative, le noyau est émetteur bêta-.
M(15N) = 15 000 109 micro unit
M(15C) = 15 010 599 micro unit
M(15N) - M(15C) = - 10 490 micro unit = - 9772 keV
Nota : pour la désintégration bêta, on peut utiliser le "mass excess" (M - A×u) au lieu de la masse atomique, car A est conservé.
thibault@csnsm.in2p3.fr, 2 octobre 2003

 

Quelle différence y a-t-il entre spin et moment angulaire et entre moment orbital et moment angulaire ?


Le terme "moment angulaire" est un anglicisme. Le terme français correspondant à "angular momentum" est "moment cinétique".
Le spin, noté S, est le moment cinétique intrinsèque d'une particule ou d'un noyau atomique : il n'existe qu'en mécanique quantique et peut prendre des valeurs entières (0,1,2…) ou demi-entières (1/2, 3/2, 5/2…) qui ne dépendent que de la particule ou du noyau considéré. En ce qui concerne les particules élémentaires, celles qui ont un spin entier (exemple : les photons, de spin 1) sont des bosons qui obéissent à la statistique de Bose-Einstein et peuvent être toutes dans le même état quantique. Celles qui ont un spin demi-entier (exemple : les électrons, neutrons, protons, de spin 1/2) sont des fermions qui obéissent à la statistique de Fermi : quand les fermions s'assemblent, ils ne peuvent pas être dans le même état quantique (principe d'exclusion de Pauli).
Le moment cinétique orbital, noté L, est un moment cinétique qui dépend du mouvement de l'objet considéré. Il est défini en mécanique quantique et en mécanique classique. Il est égal au produit vectoriel de la distance r au point de référence par la quantité de mouvement p : L = r∧p = r × m × v. Si l’objet est en rotation, le moment cinétique orbital est un vecteur qui pointe dans la direction de l'axe de rotation. Si la vitesse angulaire est ω = v/r, L = r × m × ω × r = m × r2 × ω. Par exemple, soit, en mécanique classique, un haltère, constitué de deux masses de 1 kg chacune considérées comme ponctuelles et reliées par une tige rigide de masse négligeable et de 1 m de long, tournant autour de son centre de gravité avec une vitesse de 2 tours/s. La vitesse angulaire ω est égale à 4π rad/s et son moment cinétique L = 2m × r2 × ω = 2 × 0,52 × 4π = 6,28 kgm2/s. Si l’on rapproche les masses, il faudra, pour conserver le moment cinétique, que la vitesse augmente : ainsi, si la distance passe de 1 m à 0,5 m, la vitesse angulaire augmentera de 2 à 8 tours/s. Le même phénomène est observé quand les patineurs font des "pirouettes" : s’ils rapprochent les bras du corps, leur vitesse de rotation augmente. Pour s'arrêter, ils écartent les bras. En mécanique quantique, les moments cinétiques intrinsèques S et orbitaux L des différentes particules d'un ensemble complexe se combinent pour donner le "moment cinétique total" J : J = L + S.
thibault@csnsm.in2p3.fr, 19 décembre 2003

 

Pour quelle raison la densité de la matière nucléaire est-elle constante pour tous les noyaux ?


Le noyau est formé de nucléons : les protons, qui portent une charge électrique positive, et les neutrons, qui n'ont pas de charge électrique. Chaque nucléon est lui-même formé de trois quarks et peut être assimilé à une sphère de rayon 1,2 fermi environ. Le fermi ou femtomètre (abréviation fm) vaut 10-15 m (un milliardième de millionième de mètre). Les nucléons du noyau se comportent en fait comme des billes dans un sac : dès que les nucléons se touchent, il n’est plus possible de les comprimer. La densité du noyau est donc constante comme celle d'un sac de billes et son volume augmente proportionnellement au nombre de nucléons.
thibault@csnsm.in2p3.fr, 29 décembre 2003

 

Qu'est-ce qu'un nucléide et quel est le symbole utilisé pour le décrire ?


Le nucléide (ou nuclide) est le noyau de l’atome. Il est caractérisé par son nombre de protons (Z, appelé numéro atomique) et de neutrons (N).

1) La notation la plus simple utilisée pour décrire le nucléide est la suivante : ANom de l'élément
A étant le nombre de nucléons : A = N + Z
Exemple : 208Pb
Pour le plomb 208, Z = 82, donc on obtient : N = A - Z = 208 - 82 = 126

2) On peut aussi définir l’élément en précisant son numéro atomique Z : AZNom
Exemple : 20882Pb

3) On peut également spécifier le nombre de neutrons N pour comparer plus facilement les nombres de neutrons de différents éléments : AZNomN
Exemple : 20882Pb126

chomaz@ganil.fr, 8 novembre 2004

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